Mission n°3 – Débriefing – Jeudi 29 septembre 2035 – 1845 – Point d’insertion de l’équipe alpha.
Journal d’Anatoli, médecin au sein de la section Alpha.
« Mon voisin d’en face, stupéfait, me regarde avec des yeux gros comme des soucoupes… Et pour cause… Je viens de lui restituer mon déjeuner version gerboulade sur ses chaussures toutes cirées…
J'aime pas les hélicos… Je l'ai déjà dit. Dès que je passe plus d'une heure à bord de ces trucs volants, ça ne va plus du tout… Je contrôle plus rien.
Et ça fait plus d'une heure qu'on vole vers notre nouvel objectif : on attaque le Takistan ! Enfin !
Nos « politiques » ont enfin compris que le Takistan soutenait toutes sortes de Ben Khlélif, de Lazaridis et autres chefs de guerre tribaux de la sorte. Une opération sous couvert de l'OTAN a donc été minutieusement préparée, et nous voilà encore une fois en première ligne… Mais cette fois-ci, nous arborons fièrement nos uniformes.
Nos objectif premier consiste en la capture de l'aérodrome de Loy Manara, situé à la frontière du Zhizikistan et du Takistan. C'est un pré-requis avant d'aller plus loin, car le contrôle de cet aérodrome nous permettra d'acheminer tout le matériel dont nous avons besoin pour la poursuite des opérations.
L'OTAN semble avoir fait de la capture de Lazaridis et du Dentiste, une priorité Alpha. Ça veut dire qu'à peu de choses près, on se fout des dommages collatéraux.
Notre objectif secondaire consiste ensuite en la sécurisation de la bourgade de Loy Manara, située près de l'aérodrome.
Bref : aujourd'hui, c'est la guerre… Et quand je regarde la tronche des pompes de mon voisin d'en face, je me dis qu'elle ne commence pas très bien…
Je jette un coup d'oeil à Flash, le « Missionnaire »… Il a une nouvelle paire de lunette Rébagne… ça lui a coûté un bras au marché noir… Mais je le sens tranquillisé avec cet objet sur le nez… A chacun ses objets porte bonheurs...
J'ouvre mon sac à dos… J'ai tout ce qu'il faut pour soigner les blessures par balles et autres dommages causés par toutes sortes d'armes… Mais rien contre le mal de mer…
Gloubs...
La voix du copilote retentit dans la radio de l'hélico : il nous reste deux minutes avant l'arrivée sur zone…
Je regarde par le hublot… Au loin, venant de notre objectif, des colonnes de fumée sont visibles. De manière évidente, des chasseurs-bombardiers F-59 « Shell Displayers » viennent de faire un passage sur les infrastructures de l'aérodrome.
L'hélico amorce un large virage par la gauche, afin de nous déposer à 500m de la piste. Je serre les dents… Mon voisin d'en face aussi…
Nous nous posons dans un tourbillon de poussière… Je sors et, comme mes compagnons d'armes, fonce droit devant et me jette à plat ventre.
Devant, le résultat des bombardements précédents est visible. Mais des hommes armés tentent de s'organiser dans ce qui reste de la base. Il va falloir les en déloger. Et ces types ne se rendront pas…
Nos sergents nous donnent l'ordre de marcher en colonne vers un massif de rochers bordant l'ouest de la base, afin de prendre appui et de préparer l'assaut dans de bonnes conditions. En effet, foncer droit devant serait suicidaire… On peut dire ça comme ça.
Nous arrivons à l'abri des rochers. Effectivement, c'est une excellente position d'observation. L'autre groupe d'assaut se trouve à l'opposé de nous, et il va être intéressant de coordonner notre attaque.
Le sergent demande par radio à l'autre section d'effectuer une diversion, afin de dégager la zone de notre secteur. Ça va nous permettre de traverser la zone de 400m qui nous sépare des premiers bâtiments de l'aérodrome.
Mmm… La nuit tombe… On va pouvoir profiter de la semi obscurité pour courir vers les hangars.
Nous attendons le début de la diversion. Nous sommes tendus et inquiets à l'idée de galoper à travers ce terrain dégagé. Mais c'est notre devoir : tout le monde compte sur nous.
Et c'est parti… Sans réfléchir, je suis mes camarades qui viennent de s'élancer. Quelques impacts de balles viennent soulever des petites gerbes de poussière… C'est qu'ils visent pas trop mal, les bougres… Je zigue-zague afin de maximiser mes chances d'atteindre le premier bâtiment…
Devant moi, les premiers arrivés prennent position près des bâtiments. Notre riposte commence. Nous déployons la Minimi, et c'est un feu nourri qui est alors dirigé vers nos ennemis.
Je retire mon silencieux, et vide un chargeur sur les positions ennemies. De temps en temps, une silhouette s'effondre en face de nous, et petit à petit, la puissance de feu de nos adversaires diminue.
Au bout de 20 minutes, pris entre deux feux, les défenseurs se replient vers l'extérieur de la base, en direction de Loy Manara. Et la nuit est tombée… J'allume mes JVN.
Nos sous-officiers profitent de ce repli pour réorganiser l'occupation de l'aérodrome. Déjà, un premier appareil gros transporteur Ta-007 « Big Belly » atterrit sur la piste nouvellement conquise. Deux véhicules blindés sortent alors de l'énorme avion.
Je monte à bord du premier, avec Joarius comme conducteur. Je prends possession de la tourelle avec sa mitrailleuse haute vélocité, crachant des obus de 20mm à une cadence infernale. Avec ça, on est couvert...
Tout fonctionne parfaitement. Je redescends du véhicule pour retrouver mon chef de section. Nous en profitons pour nous réapprovisionner en munitions...
C'est alors que des coups de feu venant de l'Est de la base éclatent. Suivis des cris de nos sous-officiers qui, instinctivement, se sont déjà mis en position pour répliquer.
Je saute derrière une caisse et ouvre le feu à mon tour dans la direction des tirs.
Partout, nos traçantes marquent les positions ennemies…
On dirait que les locaux tentent le tout pour le tout afin de reprendre leur aérodrome ! Mais c'est pas de bol pour eux : on est là ! Et on va s'y accrocher, à cette foutue piste…
Le combat est bref et violent. En face, ce ne sont pas des troupes d'élite… ça se voit… A un certain moment, ils ont commis l'énorme bourde de sortir de leur position pour tenter une charge vers l'entrée de la base… Deux Minimi et une dizaine de Famas ont aussitôt fait la différence…
Une fois le dernier coup de feu tiré, nous fouillons tout le périmètre. La section Foxtrot arrive alors en remplacement afin de sécuriser le périmètre.
Nous nous regroupons donc pour un rapide débrief. A l'issue de celui-ci, nous voilà dispatchés dans trois véhicule, dont celui dans lequel je me trouve qui est le seul armé.
Nous prenons la route de Loy Manara ; derrière moi, j'aperçois les colonnes de fumée venant de l'aérodrome. Bon sang : ça a été chaud, malgré tout !
Nous stoppons pour récupérer un petit groupe de notre section.
La route jusqu'à Loy Manara est dégagée. Aucune embuscade. C'esr rassurant, et ça conforte le fait qu'on les a vraiment pris par surprise…
Les deux véhicules de têtes s'arrêtent et nos gars descendent pour se positionner à l'entrée du village. Nous recevons l'ordre, Joarius et moi, de nous positionner sur un point en hauteur, afin d'assurer une couverture de la zone.
Jo me fais signe qu'il y a une petite bute à 300m du bourg. Nous nous y rendons.
Une fois arrêté, je balaye la zone en utilisant les diverses options optiques reliées à la mitrailleuse. J'aperçois les camarades qui ont déjà amorcé leur progression dans le village.
Tout à coup, une silhouette se détache sur mon écran. Puis deux autres… Je préviens Jo qui lance aussitôt un appel radio aux chefs de sections dans le village. Sur mon dispositif optique, j'aperçois aussitôt les silhouettes de nos sections qui se dépêchent de trouver un couvert pour se mettre en position de les recevoir.
J'attends l'ordre d'ouvrir le feu. Dès que celui-ci me parvient, je balance plus de 500 cartouches sur les silhouettes ennemies. Le résultat est sans appel : une partie de ce petit groupe de combat n'existe tout simplement plus. Vaporisé. Eradiqué de la surface du globe…
Alors que les sections Alpha et Bravo, dans le village, finissent de le nettoyer, Joarius, sur ordre, démarre le véhicule et se dirige vers l'entrée. Nous y retrouvons Flash qui a visiblement des consignes à nous transmettre.
Dans le village, le calme est revenu. C'est alors que retentit ce que je croyais être un coup de feu, derrière nous. Instinctivement, je me jette au sol et prends mon arme.
Mais rien d'autre ne se passe… Je relève la tête, et vois notre blindé léger encastré dans un muret, deux roues complètement explosées. Joarius, l'auteur de cette brillante manœuvre, regarde incrédule le spectacle…
Nos deux sections se regroupent alors autour du pauvre véhicule, dont il y a fort à parier qu'il vient de terminer ici sa (courte) carrière...
La discussion fait rage sur l'état de celui-ci, Jo voulant le réparer et nos sous-officiers estimant qu'on n'avait pas le temps pour ça. Au bout de deux minutes, ordre est donné à tout le monde de s'écarter… Joarius se retrouve avec une charge de C4 dans les mains, et la tête que fait le sergent Cépu à ce moment-là ôte toute envie de discuter ses ordres… Il vient en effet d'ordonner à l'auteur du désastre de faire sauter le véhicule irrécupérable…
Comme tout le monde, je m'éloigne, et regarde tristement la fin du valeureux véhicule. J'en profite pour sortir une ration de bouffe, et la mange telle quelle : crue ! Ça m'a donné faim, cette histoire. Et je ne suis pas le seul.
Au bout de 10 minutes de pause dans le village nouvellement conquis, le capitaine Shrek reçoit un appel radio du QG installé sur l'aérodrome.
Un hélico transportant une section de reconnaissance a été détruit à 10 km de notre position, en pleine zone montagneuse contrôlée par l'ennemi. Etant le seul groupe de combat aussi avancé en territoire ennemi, un appareil va venir nous récupérer et nous conduira sur le lieu du crash. Nous avons pour ordre de récupérer les éventuels survivants et de les ramener sur l'aérodrome.
Ça, c'est la tuile… Parce qu'un hélico abattu, c'est un sacré trophée pour les bouseux du coin… Il y a fort à parier que ça va être chaud, là-bas…
Notre nouveau moyen de transport arrive alors et se pose à 100m de notre position. Tout le monde se dirige vers lui.
A bord, nous restons silencieux. Il faut dire que le tableau n'est pas des plus roses. Pour résumer, on va en plein territoire inconnu, que l'ennemi doit parfaitement maitriser. Et on ne sait pas ce qu'on va y trouver.
Nos renseignements parlent de quelques combattants isolés. Je crois que j'ai déjà du vous dire ce que je pensais des informations données par nos renseignements…
Dans nos sept heures, la base de Loy Manara est visible. Apparemment, le Génie a remis en service l'éclairage. Efficaces, les gars…
Le relief s'accentue devant nous. Je croise les doigts pour qu'il n'y ait pas de coup dur… Si on doit rentrer par nos propres moyens, ça va être problématique…
Alors que nous passons plusieurs vallées, la zone de drop est visible devant nous : un petit plateau bordant la vallée dans laquelle a été repéré le crash.
Une lumière verte accompagnée d'une sirène stridente indique qu'il faut qu'on dégage de l'hélico. Ok : c'est parti !
Je saute de celui-ci et une fois au sol, prends mon arme et me mets en position. Tout le monde a fait de même… L'appareil qui était en vol stationnaire à un mètre du sol effectue un large virage par la droite, et dégage la zone. Il ne reviendra que sur appel de notre part…
Immédiatement, avec professionnalisme, nos chefs de section organisent la marche. La vallée est toute proche, devant nous. Il ne reste plus qu'à espérer qu'on soit les plus rapides à arriver sur les lieux, et que les éventuels hostiles n'aient pas de JVN…
ça fait beaucoup de « si », tout ça…
Nous voilà arrivés sur une pente qui nous mène droit vers notre objectif. Instinctivement, nous accélérons tous…
Il n'est pas dur à repérer, le crash… C'est que ça brule bien, un hélico… Il doit être à environs 400m de notre position. Le groupe se déploie afin d'assurer une couverture sur les flancs. Je fait partie de la couverture du flanc droit.
Les camarades qui se sont dirigés vers le site du crash annoncent alors avoir récupéré un survivant. Les autres sont hélas morts…
Mais à ce moment-là, nous apercevons des silhouettes armées qui se déplacent vers nous, sur le côté droit. Elles sont à peu près à 300m de notre position, et ne nous ont pas encore repérés. Mon chef de section nous fait une série de gestes rapides.
J'ai compris qu'à son signal, on allume nos pointeur laser et on arrose le groupe ennemi. Je mets vite un chargeur contenant des traçantes dans mon arme.
L'attente paraît durer une éternité, même s'il ne se passe qu'une minute avant que l'ordre d'ouvrir le feu soit donné.
Les combattants ennemis, totalement surpris, n'opposent qu'une faible résistance et sont rapidement mis hors de combat. Nous décrochons en bon ordre vers le centre du crash.
Arrivé sur place, je me rends compte que c'est un miracle qu'il y ait eu un survivant. Les camarades sont en train de récupérer ce qui peut l'être, et enterrent les infortunés compatriotes.
Le capitaine m'appelle, et je commence à donner les premiers soins au gars ayant miraculeusement survécu. Je le considère en état de choc, mais capable de marcher avec de l'aide.
Une fois le gars sur pied, nous nous retirons du site, en bon ordre. Mais il faut remonter la pente, et c'est raide !
Pendant l'ascension, le capitaine appelle notre hélico par radio. Il se retourne vers nous et nous informe que celui-ci sera sur zone dans 10 minutes.
C'st long, 10 minutes dans ces conditions… Vous pouvez me croire !
Le bruit caractéristique des pales fendant l'air se fait alors entendre… Jamais à l'heure, ces pilotes ! Il aura mis 12 minutes. Ok, ok : je chipote…
Toute la fine équipe embarque, et nous retrouvons le sourire sur le chemin du retour. Le capitaine nous a en effet promis 24 heures de repos une fois à Loy Manara.
J'espère juste que l'intendance a eu la bonne idée d'acheminer des bières sur place. Parce qu'avec la chaleur qui règne en journée dans ce trou, ça va vite devenir indispensable !
Voilà donc notre arrivée effectuée de manière officielle et fracassante. Lazaridis et son pote le Dentiste peuvent commencer à avoir le trouillomètre à zéro. Parce que moi, à leur place, je l'aurais... ».